Il y a dans ce sympathique journal des auteurs plus énervés que d’autres. Si ceux-ci étaient déjà enragés toute l’année avant le Covid-19, la pandémie ne les a pas aidés à trouver la paix intérieure. C’est ainsi que l’on se trouve avec des articles très vindicatifs, aux titres fleuris, de notre ami l’insomniaque comme « une nation d’immature » ou « D’où viennent les tarés du Corona ? », ou encore mon préféré « Des maths et du bruit ». Je veux bien reconnaitre à mon collègue un sens de l’hyperbole et qu’il soulève d’intéressantes questions. Maintenant, il serait temps de proposer des pistes de réponses. Et, au risque de choquer, je pense que les propos rancuneux des « tarés du Corona » ou de l’Insomniaque sont les versants de la même pièce.
Un exemple historique qui permet de démarrer mon propos, ce sont les procès de Salem. Et cela me permettra d’être en harmonie avec la période d’halloween. En 1692, cette petite bourgade du Massachusetts habitées par des colons puritains a connu un épisode d’hystérie collective et la population a pendu pour sorcellerie 14 femmes et 6 hommes. Selon les estimations hautes, se seraient plus de 300 personnes qui auraient été accusées par la communauté. Vous vous demander le rapport ? Et bien les historiens pour expliquer cette catastrophe, privilégient la piste suivante : cet épisode est l’explosion des tensions induites par des crises que subissait la communauté.
En effet, la communauté vivait dans l’angoisse d’un futur incertain après avoir perdu son statut auprès de la couronne d’Angleterre. Ainsi isolée, elle se remettait difficilement des guerres indiennes, qui avait littéralement décimé la colonie, et vivait dans un climat de peur causé par des raides réguliers d’amérindiens. Son économie, devenant marchande, subissait une forte transformation qui remettait en question la structure sociale de la colonie et la place du clergé dans la vie des bons citoyens. Au abois, la communauté a déversé cette tension intenable en se lançant dans cette purge aveugle basée sur des délires loufoques, même pour l’époque.
Je suppose que cette petite histoire horrifique vous a parue familière. Une société mise sous pression par la remise en question de son système économique secoué par des crises. Empêtrée dans des guerres asymétriques et vivant dans l’angoisse constante d’une attaque sur sa population. Une société qui fait face à un sourd péril sur son existence sur lequel elle n’a que peu de contrôle. Aujourd’hui, tout le monde occidental est à Salem.
Nos histoires loufoques à nous, nos moyens de purger nos angoisses, sont différents. Mais, la mécanique diabolique est la même. Elle témoigne d’une volonté de reprendre le contrôle sur sa vie et sur sa société. Et, comme il n’y a que peu de possibilités de reprendre un contrôle effectif, beaucoup se rabattent sur des solutions qui donnent une impression de contrôle. Si je lutte contre le complot maléfique qui veut briser mes libertés, je suis dans l’action. Si je fais appliquer les mesures sanitaires pour accélérer la fin de la crise je participe à la solution. Si je ne suis pas un mouton qui accepte le masque ou le vaccin, je suis celui qui décide. Si je me défoule dans des articles acerbes sur les corona-septique je rétablis l’ordre. Pour chasser la terreur que nous inspire les ombres inconnues de la nuit, autour d’un feu de camp, nous nous racontons des histoires qui font peur et dont nous sommes les héros.
wendigowak
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